Ce mardi à l'Hôtel Beaulac de Neuchâtel, le nouveau Prix Shapers 2018 honorera une première volée de dix lauréats. Le trophée, un lingot de fer, symbolise l'ADN de ces PME et leur richesse. Leur point commun? "Ce sont tous des chefs de petites et moyennes entreprises qui n'ont pas hésité à investir dans les développement qu'impose la société 4.0", explique Xavier Comtesse, de Manufacturing Thinking, l'initiateur de cette distinction. Créé il y a cinq ans ce think tank, d'abord dévolu au secteur horloger, a depuis élargi son champ d'observation et couvre tout le champ de l'innovation dans l'industrie en général.
Domaines variés
Les dix entreprises retenues, sur une soixantaine de candidates, ont toutes investi dans des domaines aussi divers que l'impression 3D, le big data, l'intelligence artificielle, la robotique, les nouvelles techniques de management, l'automatisation ou l'internet des objets. "Le 4.0 n'est pas une notion abstraite, comme peut le penser le grand public, souligne Xavier Comtesse. C'est déjà notre quotidien, comme les smartphones, l'internet des objets et les montres connectées, ou la réalité de demain, à l'instar des voitures autonomes. Les innovations dans la reconfiguration des espaces urbains en villes intelligentes, ou smart cities, pour les places de parc notamment sont à nos portes."
Différent des start-up
Tous ces domaines sont habituellement associés au monde des start-up. C'est précisément cet amalgame automatique que ce Prix Shapers entend défaire. "Il y a tout une mythologie de la start-up, analyse Elmar Mock, fondateur de Creaholic, à Bienne, et membre du jury. C'est très bien, j'y ai d'ailleurs grandement contribué, cependant les strat-up ont déjà la reconnaissance qu'elles méritent, ce qui n'est pas cas pour les petites et moyennes entreprises."
La société ViDi Systems SA, créée par Reto Wyss, active dans le "machine learning", Factory5 et sa nouvelle approche de la sur-traitance industrielle, regenHU et ses technique d'impression 3D du tissu vivant, le centre MMT de la marque horlogère Frederique Constant, ou le management horizontal introduit dans sa PME Apco Technologies SA par Aude Pugin : tout ces exemples montrent que les entreprises dites traditionnelles "sont capables de prendre des risques et d'investir pour s'adapter à la modernité, en pensant à l'avenir plutôt qu'au rendement à court terme", pointe Elmar Mock. "Prenez l'exemple de l'entreprise Willemin-Macodel, dont le directeur R&D Denis Jeannerat a mis au point une machine 4.0 numérique qui est un système de visionnement des pièces qu'elle produit, reprend Xavier Comtesse. Si la pièce a le moindre défaut c'est elle qui corrige d'elle-même la machine!"
Attirer les jeunes diplômés
Les PME sont les forces vives du tissu économique suisse : elles totalisent environ 90% des emplois de l'industrie. "Mais on parle davantage des start-up, ou des grands groupes comme ABB, Siemens ou Nestlé", rappelle Xavier Comtesse. Les mettre en avant, c'est aussi signaler aux jeune générations. "Les jeunes qui sortent fraîchement diplômés des écoles spécialisées pensent en général d'abord aux grandes entreprises ou aux incubateurs de start-up, mais moins aux petites entreprises."
Moins sexy? "Peut-être, mais à tort, constate Xavier Comtesse. Et puis, elles sont souvent en périphérie des centres urbains, voire en hauteur, notamment dans l'arc jurassien. Mais leur vitalité et leur modernité sont indéniables."
Toutes ces PME partagent une vision qui s'étend sur une ou deux générations, et ont su éviter le double écueil du conservatisme (répéter les gestes des prédécesseurs) et de la minimisation des risques. "Les start-up sont les bébés dans la pouponnière, tandis que ces entreprises sont les jeunes adultes du monde industriel. Elles valent bien un coup de projecteur.
Article original publié dans Le Matin / Auteur : Ivan Radja